La statue de Jeanne d’Arc à Quintenas
Elle domine bravement la place de notre village, plantée en haut de la fontaine publique. Les Quintenassiens vivants l’ont toujours vu là. Jeanne d’Arc est si familière dans le paysage que la place de l’Église a même été appelée place Jeanne d’Arc au début du XXesiècle comme en attestent ces cartes postales.
Les plans de l’architecte Borione pour la fontaine publique prévoyaient une vasque décorative couronnant le pilier central. La fontaine fut mise en service en 1902 mais on ignore si cette vasque fut un jour en place. En effet, toutes les photographies disponibles montrent ce pilier surmonté de la statue de Jeanne d’Arc.
Il s’agit d’une statue en fonte de 1,40m de haut, montrant Jeanne revêtue de son armure, son épée dans un fourreau, son casque à ses pieds, tenant un étendard de la main droite, la main gauche posée sur le cœur. Elle a été réalisée d’après les dessins du sculpteur parisien Adolphe Roberton (1853-1899). Ce dernier a participé à plusieurs salons des Artistes Français dont il était sociétaire, présentant, entre 1882 et 1899, des bustes en plâtre ou des bronzes.
L’œuvre de Roberton a été diffusée par la fonderie Durenne, installée à Sommevoire (Haute-Marne). Grâce à sa collaboration étroite avec des artistes et une qualité technique indiscutable, la maison Durenne tenait une place prépondérante dans la fonte d’art française. La firme a collectionné les récompenses lors des Expositions Universelles de Paris en 1867 et 1900, de Vienne en 1873, auxquelles elle a participé.
La Jeanne d’Arc de Roberton a fait l’objet d’une production importante même après la mort du sculpteur. L’association Les Compagnons de Saint-Pierre, qui se consacre à la conservation des collections de la fonderie Durenne, a pu retrouver un ensemble de photographies datant de 1893, destinées à la création d’un nouveau catalogue dans lequel figure le modèle en plâtre de notre Jeanne d’Arc.
Nous remercions ici M. Hauer pour les recherches qu’il a effectuées dans ce fonds de plus d’un millier de photographies au collodion.
Photographie au collodion de la Jeanne d’Arc de Roberton • 1893 • Collection Les Compagnons de Saint-Pierre
Éditée à plusieurs dizaines d’exemplaires, cette statue a été souvent utilisée lors de l’érection des monuments aux morts dans les communes françaises au début des années 1920. Toutefois la Jeanne d’Arc de Quintenas a été installée avant la Grande Guerre comme en attestent les cartes postales datées 1910 et 1911. Si elle n’a pas figuré dès la construction de la fontaine en 1902, il est probable qu’elle ait été érigée pour commémorer la béatification de Jeanne d’Arc qui a eu lieu le 18 avril 1909.
La statue en France et à l’étranger
C’est cette même statue qui couronne les monuments aux morts ardéchois d’Arlebosc, du Cros-de-Géorand et de Bozas (dans une taille très inférieure pour cette dernière).
On peut la rencontrer dans de nombreuses autres communes sur tout le territoire, dans des environnements très différents, ruraux, urbains, au cœur de l’habitat ou à l’écart : Blois-sur-Seille (Jura), Mars-La-Tour (Meurthe-et-Moselle), Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis), Pennedepie (Calvados), etc.
Elle a même été érigée aux États-Unis où elle trône devant le centre médical Pacific Alliance de Los Angeles (Californie). Le socle de la statue a été gravé en français « Jeanne d’Arc ».
Le contexte
Le choix de Jeanne d’Arc pour orner la fontaine publique de Quintenas correspond bien aux préoccupations du temps. Jeanne est Lorraine ; cette province est annexée par l’Allemagne depuis 1871 et la France entière rêve de la reconquérir. Elle cristallise parfaitement le sentiment national depuis le succès du livre que lui a consacré Jules Michelet (Jeanne d’Arc, Livre V de son Histoire de France). C’est une fille du peuple, une résistante patriotique, une icône incontestable pour les Quintenassiens du début du XXesiècle.
Liens utiles
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